45,5 x 60,5 cm
1859
Aquarelle et rehauts de gouache
Signé, daté et dédicacé en bas à gauche « Adam à son ami Emile Duquesne 26 octobre 1859 »
Provenance :
• France, collection particulière.
Bibliographie :
• Christian Vivier, L’aventure canotière : Du canotage à l’aviron. Histoire de la nautique bisontine (1865-1930), [Thèse], université Claude-Bernard de Lyon, Paris : Association francophone pour la recherche en activités physiques et sportives, 1994
À Paris, l’activité dite de « canotage » naît dans les années 1840. Cette néologie circule dans la presse comme une activité de navigation en promenade ou en course dans des « canots », embarcations non pontées fonctionnant à la rame. Le succès rencontré permet de développer les manifestations organisées autour de cette nouvelle activité. Progressivement, les communes riveraines des bords de Seine organisent leurs évènements, à travers des sociétés de Régates, et attirent une grande affluence de spectateurs.
Les plus anciennes et les plus célèbres régates des environs de Paris sont celles de la ville d’Asnières dont nous vous présentons ici un exemple datant de la fin des années 1850. L’artiste, Albert Adam, s’est adonné à la représentation précise et minutieuse de cet évènement populaire. Sur les berges de Seine une foule en émulation s’agite près des embarcations, habillée pour l’occasion : les femmes ont revêtu leur plus bel ensemble et portent chapeaux et crinolines ; les hommes sont tantôt en habit et haut de forme, tantôt en tenue d’équipage. Certains encouragent à bras levés les canotiers élancés, d’autres discutent, d’autres encore, réunis autour d’un pique-nique, fument la pipe.
Au-delà de l’admiration sportive, les régates deviennent, au milieu du XIXe siècle, un rendez-vous incontournable de la vie autour de la capitale. L’évènement revêt un caractère social indispensable, on parle de « bals de rivière ». Attirés par ce charme sauvage, loin des rumeurs de la ville, les parisiens déferlent sur la Seine. La célèbre Grenouillère de Croissy, dépeinte par de nombreux impressionnistes et surnommée « Trouville des bords de Seine », y accueillera l’empereur Napoléon III et son épouse Eugénie en 1869.
Ces lieux de rencontres et de plaisirs furent largement critiqués par les romantiques qui y voient une hypocrisie nouvelle. Dans La Maison Tellier, Guy de Maupassant traduit ce phénomène : « Quelques habitants des environs y passent en curieux, chaque dimanche ; quelques jeunes gens, très jeunes, y apparaissent chaque année, apprenant à vivre. Des promeneurs, flânant, s’y montrent ; quelques naïfs s’y égarent. »
Le terme familier d’« aviron » que nous connaissons fut importé d’Angleterre où la course de ces bateaux étroits naviguant sur les fleuves et rivières connaît une renommée mondiale dès les années 1830. La plus fameuse compétition demeure celle organisée sur la Tamise entre l’université d’Oxford et celle de Cambridge en 1829. En France, le canotage prend une tournure internationale à partir du milieu du XIXe siècle.
En 1853, la Société des Régates Parisiennes (S.R.P.) organise le premier Championnat de Seine. En 1859, date à laquelle Albert Adam réalise notre gouache, le Rowing Club de Paris (R.C.P.) importe le modèle britannique : les équipes nouvellement entraînées sont désormais organisées en « clubs », les canotiers devenus professionnels sont appelés « rowing men ». La ville d’Argenteuil accueille ainsi en 1867 les courses organisées à l’occasion de l’Exposition Universelle.
Passionné par ce nouvel essor sportif, Albert Adam étudie le départ des rowing men à Asnières en 1859 et en réalise par ailleurs une lithographie (ill. 1). Dédicacé à son ami Émile Duquesne, notre dessin dévoile, à travers une composition divisée horizontalement en deux parties, les deux aspects principaux de ces évènements : une foule en émulation devant les bateaux désormais organisés en équipe, tous juste élancés sur la Seine.
M.O