Annibale CARRACCI (Bologne, 1560 – Rome, 1609)

Paysage avec un berger et son troupeau

20.2 x 27.3 cm

Plume et encre brune sur papier beige.

Provenance :
• Collection Max Aaron Goldstein (1870-1941)1.
• Une ancienne inscription au revers présente le dessin comme d’Annibale Carracci.
• France, Collection particulière.

Cousin de Lodovico et frère d’Agostino, Annibale Carracci demeure une figure majeure de la peinture bolonaise du XVIe siècle. Annibale sera cependant le seul des trois à connaître véritablement le succès. Très jeune, son habileté à l’art du dessin lui permet de fournir ses premièrs dessins d’après les maîtres anciens, dont le Corrège (Correggio, 1489 - 1534). On a par ailleurs souvent confondu les paysages d’Annibale avec ceux de Domenico Campagnola (Venice (?) 1500 – Padua, 1564) pour ses nombreux dessins de paysages inspirés du Titien.
Célèbres pour la création de l’Accademia degli Incamminati fondée en 1582, les trois artistes apportent un renouveau esthétique dans l’art à travers la place qu’ils accordent au dessin. Leur enseignement est issu de la théorie platonicienne selon laquelle le dessin doit traduire une idée en réduisant l’écart entre l’idée et le réel. À partir de ce postulat, le dessin est une étape primordiale de création : l’œuvre d’art devient intellectuelle.
Au tournant du siècle se développe progressivement un intérêt tout particulier pour la représentation du paysage, non pas comme genre à part entière mais comme instrument de représentation de la réalité. Il fut traité à la fois par Annibale, à Rome notamment, mais également par Lodovico et Agostino.

L’approche intellectuelle du travail d’Annibale Carracci lui permet de présenter ses dessins comme des œuvres finies. Il se différencie de ses contemporains par la clarté de ses compositions, par sa rigueur et par l’étude poussée des figures et des gestuelles soigneusement intégrées dans ses paysages Titianesques.
Notre dessin présente une finesse de composition caractéristique de son œuvre. La subtilité de son crayon lui permet de lier le premier et le second plan en traitant délicatement l’ensemble de souples coups de pinceau, larges pour l’arrière-plan et plus resserrés pour le massif végétal et l’élégante figure du berger au premier plan. Les lignes et formes se confondent dans un ensemble méticuleusement pensé. Dans ce cadre de nature apaisant, une douce sensation de mouvement envahit la scène, provoquée par une brise qui semble souffler sur l’ensemble.

La poésie caractéristique de ses œuvres assura à Annibale une solide réputation tout au long de sa carrière, notamment grâce au soin minutieux apporté à ses dessins, domaine dans lequel il excella. Notre dessin est un formidable témoignage du processus attentif de représentation de la nature et plus largement, de l’importance du dessin comme incarnation de l’idée de l’artiste.
À Rome et Parme, Annibale fut appelé pour de grands projets de décoration, mais ce sont ses années à Bologne qui lui seront certainement les plus chères. Il voyagea afin d’enrichir ses connaissances des maîtres anciens, mais également dans le but de les transmettre et répandre l’enseignement des Carracci.
M.O.

Nous remercions M. Nicholas Turner de nous avoir confirmé l’authenticité de notre dessin sur examen d’après photo (certificat en annexe daté du 17 juillet 2013).

1Notre dessin a appartenu à Max A. Goldstein (1870-1941), médecin exerçant à St Louis dans le Missouri, pionnier de l’otolaryngologie, et collectionneur de dessins de maîtres anciens (voir F. Lugt, Les Marques de Collections de Dessins & d’Estampes, 1921 et 1956, n° 2824). Comme cité dans Lugt Suppl, les ventes de la collection de Goldstein ont eu lieu en 1920, ainsi que les ventes post mortem (une en 1944 et deux en 1945). Plusieurs des dessins de sa collection ont été acquis auprès des héritiers de Goldstein par Janos Scholz et sont aujourd’hui conservés à la Morgan Library and Museum, New York.

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