12,8 x 15,8 cm
Huile et rehauts de gouache sur papier
Provenance :
• France, collection particulière
Bibliographie :
• De David à Delacroix : La Peinture française de 1774 à 1830 (cat. exp.), Paris, Grand Palais, 1974)
• Jean-Pierre Cuzin, « François-Joseph Heim (1787-1865) : peintre d’esquisses » in Bulletin de la Société
d’Histoire de l’Art français, 1991.
C’est à Belfort, en 1789, que débute la formation artistique de François-Joseph Heim. Son père, Joseph
Heim professeur de dessin, lui donne ses premières leçons avant de l’envoyer à l’école centrale de Strasbourg où le jeune garçon obtient le premier prix de dessin à l’âge de onze ans. Son indéniable don encourage son
père à l’envoyer à Paris cinq ans plus tard rejoindre l’atelier de François-André Vincent (1746-1816).
Rapidement, François-Joseph s’entoure des meilleurs artistes de son temps qu’il côtoie dans l’atelier de
Vincent dont Horace Vernet (1789-1863). Convoitant le prix de Rome, Heim produit en 1806 une oeuvre
titrée Le Retour du fils prodigue (perdue) pour laquelle il obtient le second prix. Il accède au Premier prix l’année
suivante en présentant Thésée, vainqueur du Minotaure, une toile qui, au-delà de son caractère académique,
annonce d’ores et déjà l’habileté de sa main dans le maniement des couleurs (Paris, Ensba, inv. PRP 45).
Après son séjour à l’Académie de France à Rome entre 1808 et 1811, l’artiste revient à Paris et expose
régulièrement au Salon dont celui de 1812 et 1817, remportant par deux fois la médaille de première classe.
Heim reçoit de nombreux honneurs de son vivant dont celui de chevalier de la Légion d’honneur en 1827
et officier de la Légion d’honneur en 1855. En 1829, il devient membre de l’Institut dans la section de
peinture au fauteuil de Jean-Baptiste Regnault, décédé la même année. Il sera par ailleurs élu vice-président
puis président de l’Institut en 1853.
De son apprentissage chez Vincent, Heim développe un intérêt majeur pour les grands sujets d’histoire,
religieux et mythologiques comme l’annonçait le choix du sujet de son envoi en 1807.
Loué pour la qualité d’exécution de ses oeuvres, il côtoie rapidement le succès par de nombreuses
commandes officielles auxquelles il répond avec enthousiasme. À Versailles, il produit pour la galerie des
Batailles, à Paris il réalise plus de 10 tableaux pour des églises parisiennes. L’artiste s’illustre également dans
la peinture profane en produisant quelques oeuvres pour l’Assemblée Nationale (décor de la salle des
Conférences) ou encore par la réalisation plusieurs plafonds peints au Louvre.
Pour produire ces oeuvres, de grands formats pour la plupart, Heim multiplie les esquisses à l’huile sur papier
et sur toile, de format très restreint. Notre oeuvre semble être un exemple de cette production. La
comparaison avec certaines esquisses reconnues de la main de l’artiste telle que La mort d’un héros antique
(ill. 1) s’avère tout à fait cohérente. Réalisée à l’huile sur une feuille de papier n’excédant pas les 13 cm de
hauteur, elle témoigne d’une utilisation puissante de la couleur comme instrument de construction de la
composition. Notre esquisse représente Persée et Andromède, sujet antique maintes fois traité par ses pairs
tels que Gustave Moreau (Andromède, musée Gustave Moreau, inv. 15499), très apprécié pour son penchant
dramatique, fidèle illustration de la veine romantique qui saisit le début du siècle. La mythologie raconte
qu’Andromède, princesse éthiopienne avait été envoyé au sacrifice, attachée à un rocher pour être dévorée
par un monstre marin. En revenant de son glorieux combat contre Méduse – dont on aperçoit ici la tête sur
le bouclier – le héros grec Persée monté sur son cheval ailé Pégase, sauva la jeune femme.
Grâce à l’extrême précocité de sa pratique artistique, l’artiste développe une grande reconnaissance par ses
dons de dessinateur. Heim est aussi un coloriste assidu, passion qu’il met au service de ses dessins. Il puise
son inspiration chez ses aînés dont il semble apprécier le travail sur le rendu des sentiments par la couleur,
notamment chez Eugène Delacroix (1798-1863). L’artiste a par ailleurs pu s’inspirer de quelques oeuvres du
maître de la couleur dont Saint Georges combattant le dragon, dit aussi Persée délivrant Andromède (Paris, musée du
Louvre, inv. RF 1396).
Ses esquisses dévoilent le processus ingénieux de création de l’oeuvre en deux temps. Il trace les contours
de ses figures puis rend vivant l’ensemble par la couleur. Notre huile témoigne de cette technique en laissant
apparents les traits de construction au-dessus desquels, entre une préparation huileuse et une habile
utilisation de gouache, il construit son oeuvre.
D’une touche systématiquement très enlevée, ses esquisses sont fougueuses. Heim ne recherche pas le détail
mais l’idée. Il suggère plus qu’il ne marque et travaille régulièrement les visages de ses personnages très
brièvement, allant, dans certains cas, jusqu’à les laisser sans expression (ill. 2 et 3). Ses figures sont bien
souvent allongées : dans notre oeuvre l’encolure du cheval est anormalement étirée tout comme les jambes
du personnage de Persée. Par ailleurs le cheval, animal largement représenté en peinture par les artistes
romantiques, est une figure intéressante de comparaison de l’oeuvre de Heim. Dans l’esquisse qu’il produit pour son tableau Destruction de Jérusalem par les romains (ill. 4), la vivacité de l’animal est rendue par de savantes touches rapides de pinceau tantôt enroulées, tantôt étirées, technique à l’énergie fiévreuse que l’on retrouve dans notre esquisse.
François-Joseph Heim demeure une figure peu étudiée de l’histoire de l’art qui fut pourtant très appréciée
du Second Empire. Entre une production d’oeuvres sacrées et profanes issues de commandes officielles, sa carrière variée lui permet de connaître le succès de son vivant, traversant aisément les différents régimes
politiques que connaît la France. Heim ne répondra qu’occasionnellement aux commandes privées.
La majeure partie de son oeuvre graphique est conservée à Paris, au musée du Louvre. Ses oeuvres finales
peintes sont exposées dans quelques éminents musées français dont le musée du château de Versailles qui
conserve de grands formats historiques dont la Défense du château du Burgos, octobre 1812 (inv. MV1764), La
Chambre des Députés présente au duc d’Orléans l’acte qui l’appelle au trône, 7 août 1830 (inv. MV1814) ou encore la
Bataille de Rocroy, 19 mai 1643 (inv. MV 2721).
M.O