33 x 28,5 cm
Huile sur cuivre
Provenance :
• Vers 1900, Bruxelles, collection de la famille de Monsieur Paul Buéso, marchand et collectionneur
• France, collection particulière
Bibliographie :
• Jacques Thuillier, Jacques Stella, 1596-1657, Metz : S. Domini, 2006
• Jacques Stella (1596-1657) : en hommage à Gilles Chomer (1950-2002) [cat.exp.], Lyon, Musée des beaux-arts, 2006 - Toulouse, Musée des Augustins, 2007, Paris : Somogy, 2006
Fils d’un marchand flamand installé à Lyon frappé d’une mort précoce, Jacques Stella débute sa formation auprès de ses frères et sœurs artistes. Très vite, le talent de ce jeune artiste, remarqué parmi ses contemporains, lui permet de côtoyer la gloire. Il est admis comme pensionnaire du Grand-Duc Côme de Médicis à Florence, reçoit de nombreuses commandes à Rome et rejoint la cour d’Espagne sur invitation officielle. C’est sur ordre du cardinal de Richelieu que Stella revient en France, « luy ayant fait entendre qu’il lui estoit bien plus glorieux de servir son Roy que les Estrangers, […] le presenta au Roy, qui le receût pour l’un de ses peintres & luy donna une pension de mille livres & un logement dans les galeries du Louvre ». La même année, il est fait chevalier de Saint Michel par la reine.
Le voyage en Italie se révéla extrêmement fructueux. À Rome entre 1621 et 1634, il se fait une place parmi la communauté d’artistes français et sa rencontre avec Nicolas Poussin fut déterminante. Confrère, maître et ami, Stella admire Poussin. À ses côtés, il étudie son œuvre et son savant propos qu’il s’approprie tout en le réinventant dans une volonté méditative. Prisé pour ses expérimentations techniques dans la sélection des médiums sur lesquels il peint, Stella aborde une nouvelle clientèle avide de nouvelles richesses destinées aux cabinets de curiosité.
À Florence en 1619, Stella découvre l’œuvre de Jacques Callot qui offre une nouvelle perspective à son œuvre, désormais pensée pour être gravée. Ici, cette Vierge à l’Enfant est un excellent exemple de cette production et fut probablement réalisée en France au retour de l’artiste en 1634. Ces compositions sont savantes et équilibrées et dès lors, l’artiste rejoint naturellement le courant dit de l’atticisme parisien qui prône la simplicité et pureté de composition. Ainsi dans les années 1635-1642, il n’est pas rare de trouver une même composition faisant l’objet de plusieurs variantes, sur différents supports.
Notre Vierge à l’Enfant donna lieu à de nombreuses copies plus ou moins tardives. Elle fut avant tout diffusée par une gravure par Jean Couvay (ill. 1) réalisée à partir d’une version connue par une photo en noir et blanc issue de la collection du peintre Claude Vignon (ill. 2). Il semble ainsi exister 2 versions dont la première, à la différence de notre œuvre, fut vraisemblablement réalisée sur marbre. Elle dévoile également une légère variante de composition dans le dossier en bois sculpté de la chaise sur laquelle la Vierge est assise.
Influencé par la pensée salésienne, Jacques Stella accorde une attention particulière à l’iconographie de la Vierge à l’Enfant dans un intérieur, symbole par excellence de l’amour de Dieu. Cette idée permet de mieux appréhender la partie religieuse de son œuvre dans laquelle règnent les principales valeurs de ce courant : paix, amour, grâce, don et simplicité. Mariette voit dans la gravure de l’œuvre « La Ste Vierge en demie figure recevant les caresses de son divin fils qu’elle porte entre ses bras ». Afin de rendre visible l’humanité du Christ, le peintre complète ses compositions par la présence d’éléments domestiques d’intérieurs, ici une table nappée d’un épais velours rouge, et abandonne par ailleurs les éléments classiques du répertoire christique telles que les auréoles. La présence divine aimante est suggérée à travers l’épais rideau rouge présent dans la partie gauche.
Grâce à une parfaite maîtrise des techniques nécessaires à la peinture sur toile, métal, bois et pierre, le nom de Jacques Stella résonne, en ce milieu du XVIIe siècle, comme l’expression d’un savoir-faire unique, cultivé à son plus haut degré d’exigence. Dans notre cas, le choix du cuivre ajoute au caractère précieux et raffiné de ce tableau de dévotion, un support conservé par les amateurs les plus érudits du Grand Siècle, mais aussi dans la collection personnelle de l’artiste. Considéré comme l’un des principaux « peintres collectionneurs » de son temps, Stella se veut défenseur de la science du dessin qu’il considère indispensables pour devenir un « peintre parfait ».
M.O