Jean-Guillaume MOITTE (Paris 1746 – 1810)

« Portrait du sculpteur en pied, son maillet à la main »

Plume, lavis gris et lavis de bistre. Signé et daté à la plume « Moitte sculpteur 1778 » en bas à droite.

Formé successivement par Pigalle puis par Jean-Baptiste Lemoyne Jean-Guillaume Moitte obtint le premier prix de sculpture en 1768 avec David portant la tête de Goliath en triomphe. C’est alors qu’il entra à l’Ecole Royale des élèves protégés, institution qui ouvrit ses portes en 1749 et fut confié à la direction d’abord de Carle Van Loo et ensuite, après sa mort, à Louis Michel Van Loo afin de permettre aux lauréats du Prix de Rome de raffiner leur talent en préparation de leur séjour dans la Ville Eternelle. Moitte fut un des derniers élèves à faire trois ans d’études sous Louis-Michel car après le décès de ce dernier en 1771, l’école fut réduite de six à deux élèves et ferma ses portes en 1775. Van Loo lui apprit le dessin, les principes de composition et la conception de l’oeuvre. Le jeune Jean-Guillaume séjourna à Rome jusqu’en 1773, mais dut regagner sa ville natale à cause de sa santé fragile.

De retour en France, il s’imposa à l’attention du public avec des statuettes et de petits reliefs d’inspiration classique qui furent notamment remarquées par David. Par la suite il travailla pour l’orfèvre du roi, Henri Auguste. Un biographe de l’époque rapportait que Moitte fit plus de mille dessins pour l’orfèvre et qu’il était considéré comme le plus doué des dessinateurs attachés à Auguste.
Jean-Guillaume Moitte participa à des travaux de décoration pour de nombreux monuments dans la capitale. Il se fit une spécialité en exécutant plusieurs statues de généraux de l’armée morts au combats, comme notamment celle du comte de Custine pour le musée de Versailles, le tombeau du général Desaix au monastère du Grand-Saint-Bernard ou enfin, au Panthéon de Paris, à la demande de Napoléon, celui de Leclerc époux de Pauline Bonaparte. Pour ce dernier édifice, il avait conçu et achevé, en 1793, sous la Révolution Française, le décor de son fronton, décor qui avait pour thème la Patrie couronnant les Vertus civiles et héroïques.
Lors d’un concours établi pour la statue de Jean-Jacques Rousseau qui devait être érigée près des Champs-Elysées, Moitte remporta le premier prix mais le projet ne fut jamais mis à exécution.
En revanche, il laissa nombre de souvenirs de son burin et de son fil à plomb dans les travaux de décors extérieurs de l’hôtel de Salm-Kyrbourg, aujourd’hui Palais de la Légion d’Honneur, où il prit une grande part.
Au Louvre également, l’artiste a laissé quelques bas-reliefs remarquables, comme cette figure d’Hérodote, Cour Carrée, située tout près du Pavillon de l’Horloge. Ce même musée du Louvre conserve aujourd’hui, au cœur du département des arts graphiques, de nombreuses esquisses préparatoires de ses multiples travaux.

Les dessins ont toujours occupé une place importante dans l’activité artistique de Jean-Guillaume Moitte. On lui connait surtout des dessins réalisés à la plume et au lavis, souvent pour des projets ornementaux, et ceux à la sanguine qui paraissent plus rares.

Notre dessin révèle un portrait en pied, la mise soignée, d’un homme raffiné et plein d’élégance portant son outil de travail. Altier autant que massif, l’homme fait preuve d’une certaine prestance avec son pied droit en avant, son maillet à la main et son regard au loin comme s’il voulait juger de la justesse des proportions de sa dernière création.
On peut penser que c’est l’artiste lui même qui s’est représenté, pour la postérité ou pour son bon plaisir. Quoi qu’il en soit, notre œuvre finement esquissée révèle pleinement le talent de Moitte, notamment ce sens du modelé et la maitrise des ombres et lumières qui sont véritablement les atouts de ce dessinateur-sculpteur.

Provenance :
Vente à l’Hôtel Drouot, Paris, 20 mai 1955, lot 126
Collection privée

Exposition :
« Collector’s choice », Mississipi Museum of Art, nov 1978 – janv 1979, n° 107

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