Giovanni Battista PIAZZETTA (Venise 1682 – 1754)

« Tête de Saint Pierre »

Pierre noire et rehauts de craie blanche sur papier préparé bleu

Puissance et originalité pourraient qualifier l’œuvre du vénitien Gian Battista Piazzetta. Fils d’un sculpteur et graveur sur bois, Piazzetta fut mis en apprentissage chez Antonio Molinari, peintre tenant de l’école des « tenebrosi » à laquelle on réduisit parfois notre artiste. La manière de Piazzetta fut surtout redevable de celle de Giuseppe-Maria Crespi, dont il fréquenta l’atelier à Bologne aux alentours de 1703. De retour à Venise en 1711, Piazzetta rapportait un goût pour le clair-obscur, et une touche onctueuse et vive, parfois heurtée. La première période d’activité du peintre se traduisit par une veine dramatique, aux effets de lumière et d’animation audacieux. La tonalité brune, parfois brûlée, laissa place dans les années 1730 à une facture apaisée et une lumière plus blonde, aux couleurs irisées. Longhi (1762) parlait alors de « lumière solaire » ; Albrizzi (1760) évoque un tournant au profit de plus de « grâce, dans des teintes charmantes ». Les sujets de l’artiste gagnent alors en intimité, et s’ornent de motifs pastoraux.
La carrière de Piazzetta fut jalonnée par plusieurs grandes réalisations religieuses : il peignit à fresque en 1725, au dôme des SS. Giovanni et Paolo, une vigoureuse Gloire de Saint Dominique, et s’illustra quelques quinze ans plus tard par son retable pour l’église des Jésuites de Venise. Nommé en 1727 au sein de l’Accademia Clementina de Bologne, l’artiste fut honoré en 1750 de la charge de directeur de l’Académie de peinture, fondée cette année-là à Venise. Ses qualités de pédagogues lui attirèrent de nombreux disciples.
On retrouve dans l’œuvre dessiné de Piazzetta la sensibilité vigoureuse qui caractérise ses peintures. La manière est d’ailleurs celle d’un peintre : aucune linéarité dans les visages expressifs de l’artiste, au modelé souple et pictural. Piazzetta utilise la pierre noire rehaussée de blanc sur un large papier gris ou bleu, à l’image de notre feuille. Il n’hésite pas à laisser apparents les défauts du papier. Le visage expressif surgit d’un large revers de col, franchement ombré. La tension du cou n’est qu’esquissée, quand le modelé du visage laisse paraître les altérations de l’âge, les rides creusées sur le front et autour des yeux. La lumière modulée par les rehauts de blanc confère au modèle une certaine douceur, et suggère une atmosphère d’intimité. Quelques doigts suffisent pour évoquer les mains jointes, signant l’attitude recueillie du vieil homme.
La morphologie du visage, caractéristique des canons de l’artiste, se retrouve notamment dans la tête de Saint Pierre du Musée du Louvre : bouche aux lèvres à peine figurées, narines oblongues et pommettes anguleuses. Dans les deux feuilles, le léger da sotto in su accompagne l’expression de saisissement du saint. Au Louvre, les mains jointes laissent place aux clefs du chef de l’Eglise. Ce type de figure jalonne les peintures de Piazzetta, et s’observe par exemple dans le Saint Christophe et l’Enfant Jésus conservé au Metropolitan Museum.

Nous remercions Monsieur George Knox d’avoir confirmé l’authenticité de notre dessin d’après photo.
Provenance :
Belgique, Collection particulière

BIBLIOGRAPHIE :
- F. MALACHIN, Bortoloni, Piazzetta, Tiepolo : il ’700 veneto, catalogue d’exposition, Cinisello Balsamo : Silvana, 2010
- G. KNOX, Giambattista Piazzetta, 1682 – 1754, Oxford : Clarendon Press, 1992
- Giambattista Piazzetta : il suo tempo, la suo scuola, catalogue d’exposition, Fondazione Cini, Venezia : Marsilio, 1983

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