Jean RAOUX (Montpellier 1677 – 1734)

« Portrait d’une jeune femme en déshabillé accoudée à un parapet »

Huile sur toile

Talentueux et recherché, le peintre Jean Raoux sut étendre sa carrière au-delà du milieu artistique montpelliérain où il avait débuté. Présent à Paris dès 1701, il étudia les maîtres flamands et hollandais chez Bon de Boulogne : cet atelier accueillant de nombreux élèves, impliqué dans les débats entre la ligne et la couleur, était un lieu propice à l’émulation. Prix de Rome en 1704, Raoux séjourna en Italie, et s’installa quelque temps à Venise. Il y rencontra le prieur des Chevaliers de Malte, Philippe de Vendôme, un libertin qui restera son mécène. Raoux fut reçu à l’Académie en 1717, le même jour que Watteau auquel il s’était lié d’amitié.

Puisant ses modèles dans le monde du spectacle, Raoux se plaisait à représenter des sujets mythologiques et littéraires. Ce goût transparait dans ses portraits féminins : il dispose ses figures de manière à suggérer des scènes de genre. Le plus fameux exemple en est la Mademoiselle Prévost en bacchante du Musée des Beaux-Arts de Tours. Michel Hilaire, commissaire de la récente exposition sur l’artiste au Musée Fabre (voir bibliographie), voit dans Raoux un peintre qui, « en opérant la synthèse de la peinture vénitienne, flamande et hollandaise, assure la transition entre le classicisme, fixé de Poussin à Le Brun, et la peinture galante, de Watteau à Boucher ».
Le cadrage de notre tableau suggère l’intimité de la scène. La femme appuie son bras droit sur un parapet. Elle se penche légèrement au-dessus, posture courante chez Raoux.

L’inclinaison du buste et le tomber de la blouse découvrent sa poitrine, teintant l’œuvre de sensualité. Le mouvement de la tenture renforce cet effet : de son bras gauche elle l’écarte et se dévoile ; sa main droite la rabat pour couvrir à demi sa nudité. Le visage de la femme est peint dans une touche onctueuse ; la lumière adoucit le modelé des chairs. De sa figure aux traits harmonieux, aux joues rosées et aux paupières mi-closes, émane un sentiment presque mélancolique. Ses cheveux blonds, retombant en mèches bouclées sur son épaule, sont retenus sur le sommet de la tête par un ruban vaporeux. Ses mains rondes et courtes sont propres à la facture du peintre.
Les fleurs – que Raoux aime à peindre sur le corsage des femmes – sont ici disposées dans un vase posé sur le parapet, alliant la transparence du cristal à l’éclat des couleurs de pivoines évocatrice du désir amoureux.

Le silence (Musée Calvet, Avignon), présentant une femme à la fenêtre soutenant un rideau, le buste ployé, nous plonge dans la même intimité. C’est peut-être le Portrait de femme soulevant un rideau (Musée des Beaux Arts, Lyon) qui est le plus proche de notre œuvre, tant par le cadrage et la posture du modèle que par l’atmosphère sensuelle qui s’en dégage.

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