Louis Simon BOIZOT (Paris, 1743 – 1809)

Buste de Marie-Antoinette, Reine de France et de Navarre

H. 95 cm

Vers 1781
Marbre

Provenance :
• Vente Sotheby’s, New York, The Cyril Humphris Collection of European Sculpture and Works of Art, 10 janvier 1995, lot 71.
• France, collection particulière.

Bibliographie :
• Emile Bourgeois, Le Biscuit de Sèvres, Paris, fig. 412.
• John Hearsey, Marie Antoinette, Londres, 1972.
• Simone Hoog, Les Sculptures. I-Le Musée, Paris, 1993, p. 263, fig. 1199.

Bibliographie générale :
• Stanislas Lami, Dictionnaire de Sculpteurs de l’Ecole Francaise au Dix-Huitième Siècle, Paris, 1910,
Vol. III, p. 85-92.

Le regard distant, ses pupilles bien dessinées tournées vers la droite, la fière souveraine est reconnaissable au premier coup d’œil à son nez aquilin caractéristique, sa bouche et son menton fermes, et à ses fossettes finement rendues par l’artiste. Elle porte ses cheveux naturels cirés et coiffés vers l’arrière, où ils cascadent en boucles et rouleaux depuis son front haut orné d’un diadème et d’un rang de perles fixé par un large ruban attaché dans la nuque.

Une tresse unique, épaisse, tombe dans son dos, tandis que sa robe bordée de dentelle et nouée négligemment sur sa poitrine est en partie masquée par une étoffe drapée rabattue largement sur l’épaule gauche. Ce pan de tissu et le torse qu’il recouvre sont tronqués de façon abrupte à la base, signe que la sculpture était auparavant soutenue par un socle plus large ou par un piédestal.

Cet important buste de Marie-Antoinette a été sculpté par Boizot suite à une commande du Secrétariat d’Etat des Affaires étrangères , puis exposé au Salon de 1781.
L’œuvre qui lui a servi de modèle était présentée en 1779 dans le Salon de Correspondance. Un exemplaire identique en plâtre se trouve actuellement à Versailles.

L’année 1781 fut notable car la Reine donna naissance au Dauphin de la Couronne, le Duc de Normandie, le 22 octobre. Malheureusement l’enfant, maladif, mourut en 1789. Ce fut donc son frère cadet qui devint Louis XVII, mais il ne fut jamais couronné.

L’importance attribuée à ce buste se confirma en 1784 quand la Manufacture de Sèvres en tira un buste en biscuit qui accompagnait un buste en biscuit de Louis XVI, lui aussi d’après un marbre de Boizot.
Une telle paire de ces biscuits de Sèvres fait partie des collections de sa Majesté la Reine d’Angleterre. Emile Bourgeois a d’abord attribué ce buste de Marie-Antoinette à un sculpteur assez obscur nommé Wengmuller, dont on sait qu’il a travaillé à la Manufacture de Sèvres pendant quatre ans (1786-1789). Cependant, le modèle a depuis été réattribué à la main de Boizot par Pierre Ennes, conservateur au Département des Objets d’art du musée du Louvre.

La pose hautaine, indifférente et majestueuse de Marie-Antoinette est mise en valeur par le superbe travail du marbre. On notera la finesse d’exécution des cheveux tirés en arrière et tombant sur son cou en accroche-cœur, ainsi que le traitement subtil des traits accusés du visage, juxtaposés au plissé théâtral et profond des drapés, eux-mêmes renforcés par la délicatesse de traitement de la dentelle du décolleté.
Ce buste exprime avec force la personnalité de la jeune reine entêtée qui lança sans retenue à son confident l’ambassadeur d’Autriche Mercy : « J’ai peur de m’ennuyer ! » Cependant, dès le milieu des années 1780 elle s’était mis à dos ses sujets, qui l’affublaient, entre autres, du surnom de Madame Déficit, en référence à ses dépenses inconsidérées et à ses pertes au jeu, activités qui lui servaient d’occupation. Sa mère l’Impératrice d’Autriche Marie-Thérèse (1717-1780) pressentait à quels problèmes futurs sa fille allait être confrontée en raison de son insouciance, et bien des fois elle essaya de raisonner Marie-Antoinette à laquelle elle écrivit :
Ne laissez pas votre frivolité vous faire perdre la bienveillance première de vos sujets, car la faiblesse du Roi est connue, et le blâme retombera sur vous.

Simon-Louis Boizot a été l’élève de Michel-Ange Slodtz. Après avoir remporté le Grand Prix de sculpture en 1762 pour La Mort de Germanicus, il obtient une pension pour l’Académie française de Rome où il séjourne de 1765 à 1770. Il passe le reste de sa vie à Paris, jusqu’à son décès en 1809, et expose régulièrement au Salon organisé au Louvre. De 1774 à 1785, il exerce les fonctions de directeur des ateliers royaux de la Manufacture de porcelaine de Sèvres.

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