Pierre BOURET (1897-1972)

JEUNESSE

57 x 39 x 35 cm

Plâtre ayant servi à faire un agrandissement

JEUNESSE, 1ere version, 1935-1938. Ce plâtre a servi à faire une mise aux points pour un agrandissement au compas, afin de réaliser la grande pierre aujourd’hui conservée à l’École nationale vétérinaire de Toulouse (114 x 75 x 60 cm, FNAC 6334).

Provenance
· Collection de l’artiste, puis par héritage.
· Vente de l’atelier, 30 mars 2018, Drouot, Crait-Müller, lot 139.

Bibliographie générale (œuvre inédite)
George WALDEMAR, Jeunes sculpteurs français, Paris, 1945, p. 22.
Frédéric CHAPPEY, « Le Sculpteur Pierre Bouret (1897-1972) : “L’ouvrier du ciseau”, disciple et ami de Charles Despiau », Pierre Bouret. Sculptures : une collection de famille, catalogue de vente, Paris, Drouot, Crait-Müller, 30 mars 2018, n.p.

« Architecturer ma poétique » : telle fut la devise de Pierre Bouret, l’un des représentants les plus remarquables de la statuaire parisienne de l’époque Art Déco.

L’artiste suivit les cours de sculpture en bâtiment à l’École Bernard Palissy entre 1910 et 1912, puis ceux des Ateliers d’art municipaux. La Première Guerre mondiale vint interrompre sa carrière : engagé volontaire dès 1915, il fut décoré de la Médaille militaire et de la Croix de Guerre, et continua à servir dans l’aéronautique en Indochine jusqu’en 1923. De retour à Paris, Bouret rencontra le célèbre sculpteur Charles Despiau qu’il considérait depuis comme son maître et qui devint également un ami. Sur ses conseils, le jeune sculpteur s’était inscrit aux cours supérieurs d’art décoratif de la Ville de Paris donnés par Paul Follot. Peu après, il intégra l’une des plus renommées fonderies de l’époque, la fonderie Valsuani, comme retoucheur de cire, collaborant avec des maîtres reconnus dont Despiau, mais également Aristide Maillol, François Pompon ou Robert Wlérick.

En 1923, Bouret exposa au premier Salon des Tuileries, créé en réaction aux Salons plus officiels comme celui des Artistes français. Il devint rapidement vice-président du Salon des Tuileries, puis responsable de la section sculpture. L’artiste était également sociétaire des Salons d’Automne. Les achats de ses œuvres par l’État, ainsi que de très nombreuses commandes de monuments et de reliefs à partir de 1932 témoignent de sa notoriété grandissante qui lui valut également de participer à la rétrospective Cent ans de Sculpture Française organisée à Amsterdam et à Bruxelles en 1940. En 1935, Bouret remporta le prestigieux prix des Vikings pour un nu en pierre d’Euville, Figure couchée, exposé l’année suivante aux Tuileries et acquis par le musée du Petit Palais.

Le sculpteur aimait à se définir lui-même comme un « tailleur de pierre » et avait un sens aigu de ce matériau difficile et exigent. Admiratif, Georges Waldemar écrivait en 1940 :

« Bouret donne sa mesure quand il dégage de la matière rebelle ses reliefs de nageuses, dont les corps s’enlèvent sur des fonds vides et nus. Il y a quelque chose de rude dans ses formes de jeunes filles, dont l’élan est communicatif. Bouret méprise toute virtuosité. Son art s’impose par des vertus hautement artisanales. Nul mieux que ce sculpteur viril ne mérite le titre, entre tous enviable, d’ouvrier du ciseau. »

Mais si la pierre était le matériau qui exprimait le mieux la manière massive et puissante du sculpteur, il maîtrisait d’autres techniques et avait une connaissance parfaite de la fonte en bronze. Souvent, la pierre ne constituait qu’une étape du travail sur un motif plastique que Bouret traduisait en terre cuite, en plâtre, en marbre ou en bronze, comme s’il souhaitait épuiser toutes ses possibilités expressives.

Tout comme la Figure couchée, la Jeunesse fait partie de ces œuvres nées des recherches de l’artiste sur le corps féminin et inspirées par sa première femme, Yvonne dite Edmée, décédée en 1934. Bouret conçut cette sculpture au milieu des années 1930, comme en témoigne une Étude pour La Jeunesse en plâtre qui place la composition, mais où la figure est anguleuse et étirée. Le sculpteur en tira ensuite deux versions. La Première version, non drapée, fit réalisée vers 1935-1938 à l’échelle 57 cm. Notre plâtre servit à faire une mise aux points pour un agrandissement au compas, afin de réaliser la grande pierre exposée au Salon des Tuileries, puis acquise par l’État pour le Musée d’Art moderne de Paris et déposée depuis 1963 à l’École nationale vétérinaire de Toulouse (114 x 75 x 60 cm, FNAC 6334).

La Seconde version de La Jeunesse, drapée, est plus tardive car datant de 1942 et haute d’une quarantaine de centimètres. Il en existe un marbre, trois épreuves en bronze et une édition en terre cuite.

Athlétique et sereine, mais en même temps sensuelle, la jeune femme au sourire d’une korè grecque incarne merveilleusement cette poétique architecturée de Bouret. La surface rugueuse du plâtre rappelle déjà la pierre, elle capte et absorbe la lumière, rendant la figure quasi minérale.

A.Z.

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